Jean-Claude_MaillyEditorial de Jean-Claude Mailly (FO-Hebdo) du mercredi 22 janvier 2014

Comme nous l’indiquions dans le dernier FO Hebdo, le président de la République a confirmé l’ancrage libéral de la politique économique et sociale mise en œuvre. Il s’agit même d’une accélération.

S’adressant essentiellement aux entreprises, se référant à la logique libérale de l’offre, confirmant les diminutions drastiques de dépenses publiques (donc la réduction des effectifs concernés), il mise pour l’emploi sur le bon vouloir des entreprises auxquelles il vient d’accorder, via une suppression d’ici à 2017 de la cotisation patronale d’allocations familiales, 10 milliards d’euros de diminution de « charges » (formule patronale utilisée par le président), à ajouter aux 20 milliards à recycler du crédit d’impôt compétitivité-emploi.

En quelque sorte il donne les clés du camion au patronat –qui s’en félicite– en demandant aux syndicats de monter dans la remorque.

Nous avons contesté cette logique pour au moins trois raisons :

1. Elle s’inscrit dans une démarche concurrentielle de dumping, qui fait de l’allégement du coût du travail et des dépenses publiques et sociales l’alpha et l’oméga de la politique économique.

On oublie ainsi la compétitivité hors coût (innovation – recherche – travail en filières). On oublie aussi de préciser qu’en moyenne, le coût du travail représente 25% du coût global de production. Dès lors 5 points de cotisations patronales en moins, c’est un allégement de 5% de la masse salariale et de 1% du coût global.

Les coûts de l’énergie ou du capital sont beaucoup plus importants, mais pas touche ! On est donc bien dans la politique d’austérité que nous condamnons.

2. En indiquant vouloir transformer le CICE, c’est une reconnaissance de l’échec de ce crédit d’impôt dont on ne pourra, au mieux, mesurer l’impact sur l’emploi que dans trois ans.

Mais qu’adviendra-t-il des allocations familiales ? Le président dit qu’on n’y touchera pas, mais comment seront-elles financées, par quelles économies et quelles seront les conséquences de leur fiscalisation intégrale et de leur étatisation ?

3. Après avoir répondu positivement au patronat, il demande aux syndicats de négocier des contreparties.

Qui peut obliger une entreprise à embaucher ? Qui peut l’obliger à augmenter les salaires ?

Cela ressemble fort à un marché de dupes. Le patronat d’ailleurs ne parle que d’objectifs, pas d’engagement.

Autant on peut exiger des contreparties à une entreprise ciblée sur une aide ciblée, autant cela relève de l’illusion quand il s’agit d’une aide générale.

En termes de méthode, le président a parlé de compromis historique, de pacte responsabilisant tout le monde (gouvernement, patronat, syndicats, parlementaires). Pour Force Ouvrière, quel que soit le contenu, il n’en est pas question. Nous ne nous enfermerons dans aucun pacte, nous ne confondons pas négociation et concertation, liberté de comportement et unité nationale anesthésiante.

Dans un tel contexte, plus que jamais, il nous faut réaffirmer nos revendications en matière de salaire, d’emploi, de service public républicain et de protection sociale collective. C’est ce que nous ferons lors de notre meeting national du 29 janvier prochain à la Halle Freyssinet.

Ce pacte de responsabilité, qui découle du pacte budgétaire européen, risque d’être rapidement en contradiction avec le pacte républicain.