Alors même que le gouvernement prenait une loi d’urgence sanitaire le mercredi 18 mars donnant tous les droits aux préfets, aux employeurs pour remettre en cause le Code du travail et les statuts de la fonction publique, le lendemain, comme un désagréable écho, paraissait une déclaration commune de 5 confédérations syndicales, dont la CGT-FO, et 3 OS patronales « affirmant le rôle essentiel du dialogue social et de la négociation collective » !!!

En quoi cette déclaration aide-t-elle à la défense des droits des salariés et à leurs légitimes revendications ? En quoi peut-elle nous aider à gagner par exemple le retrait du projet de loi sur les retraites, l’abrogation de la loi sur la FP, la réforme du lycée et ses épreuves E3C…, quand elle regroupe les OS qui combattent ces contre réformes, comme la CGFT-FO, avec celles qui les revendiquent haut et fort, intégrant jusqu’aux organisations patronales qui, à moins d’une réorientation principielle qui nous aurait échappé, œuvrent à la seule satisfaction des intérêts matériels et moraux de leur classe ?

Quelle leçon tire Macron de la crise sanitaire actuelle ? Au prétexte d’une « situation exceptionnelle », d’une guerre contre un virus, il pousse jusqu’au bout sa guerre contre les travailleurs en prenant « des mesures d’exception » qui rappellent, à ceux qui voulaient l’oublier, et le faire oublier, la véritable nature de la Vème République : celle d’un « coup d’Etat permanent », avec à sa tête, « un guide suprême de la Nation ».

On peut dès lors raisonnablement penser que « l’ordre nouveau » de l’après crise esquissé par Macron dans son discours à la nation, « plus rien ne sera jamais plus comme avant », s’apparente à la Charte du Travail de Pétain.

Nous exigeons de notre confédération CGT-Force Ouvrière, en accord avec les résolutions du Congrès de Lille, qu’elle soit celle qui continue la charte d’Amiens et non pas celle qui accompagne la marche en avant vers la nouvelle charte du travail !

Alors, oui la situation appelle des mesures exceptionnelles, mais certainement pas celles visant « à mettre en œuvre tous les moyens indispensables à la protection de la santé et de la sécurité des salariés devant travailler ».Alors même que  les scientifiques, les personnels soignants répètent que si on veut vraiment les aider, il faut rester chez soi ; que si la Chine compte moins de morts qu’ en Italie, c’est justement parce qu’un confinement strict a été dès le début appliqué, notre confédération choisit de s’inscrire dans une Union sacrée qui vise à imposer la revendication patronale du « nos profits valent plus que vos vies » !

Nous exigeons donc que notre organisation rompe avec toute forme d’Union nationale pour continuer à combattre pour le maintien de l’ensemble des droits des salariés, au premier desquels celui du droit de retrait, qui dans cette période, se résume crûment au droit de vivre.

Nous demandons également que la confédération exige du gouvernement qu’il déclenche l’état de catastrophe sanitaire.

Nous faisons davantage confiance aux personnels soignants pour gagner cette guerre qu’à ce gouvernement ; par conséquent, nous demandons que la CGT-FO mette tout en œuvre pour que ce dernier réponde sans délai aux revendications de ces personnels telles qu’elles peuvent s’exprimer par exemple dans cette lettre ouverte de médecins qui demandent notamment  «  un dépistage systématique qui a fait ses preuves en Allemagne et en Corée du Sud, des lits de réanimation, des usines réquisitionnées pour fabriquer des masques, des respirateurs, la réouverture des lits fermés, des bras,… » Leurs questions sont précises, elles sont celles que se posent tous ceux qui livrent réellement bataille : « Alors que depuis des années sont matériellement asphyxiées par les enveloppes budgétaires, on nous annonce la fabrication de masques sans que soient donnés d’éléments précis : combien sont produits ? Où ? Quels délais ? Quels moyens de livraison ? Quels modes de distribution ? Alors que depuis des années, les politiques gouvernementales ont supprimé des milliers de lits de réanimation et soins intensifs (passant d’environ 26 000 lits à 13 000), le pouvoir exécutif nous annonce la mise en œuvre de moyens exceptionnels. Soit, mais la logistique étant cruciale, la confusion est mortelle : combien de respirateurs sont en cours de fabrication ? A ce jour, quel préfet est en mesure de répondre aux soignants qui sont sur le front ?

La responsabilité, l’urgence, du gouvernement est de fournir les armes et les moyens de combattre.

La transparence est d’en rendre compte précisément. »

Leur lucidité est totale et poignante, comme l’exprime à une ARS un de ses médecins : «je veux bien risquer ma vie et celle de mes équipes en soignant tous ces malades qui vont arriver. Jamais je ne vous ai attendu pour prendre une telle décision. Mais, s’il vous plaît, ne me parler pas d’union nationale, ne me parlez pas de votre efficacité, ne parlez pas de vos responsabilités, ni de l’implication des ministres qui ont fermé tous ces lits et laissé périmer tous ces masques. »

Ces personnels ont résolument choisi leur camp, celui des malades et ce faisant ils se heurtent à la volonté du gouvernement de préserver avant tout les intérêts capitalistes. Comment nous, CGT-FO, pourrions-nous, dans ces moments dramatiques, non seulement ne pas répondre à ces appels, mais au-delà, « participer » à la sauvegarde d’intérêts qui en plus de ne pas être les nôtres, nous sont contraires, et au final fatals ?

A l’unanimité du Bureau plus deux abstentions, réuni en visio conférence, le 27 03 2020