Deux think tank de caractère libéral (l’Institut Montaigne et Terra Nova) viennent de publier leur pensum sur les relations sociales. Avec quelques nuances, ils se prononcent pour une inversion de la hiérarchie des normes en donnant la priorité aux accords d’entreprise sur les accords nationaux et nombre de dispositions du Code du travail.
On pourrait ainsi aménager le Smic en réintégrant, par exemple, les abattements qui existaient avant 1968, au nom du progrès. En toile de fond, il y a la conviction (idéologique) que le Code du travail actuel est à l’origine du chômage. Ils exemptent ainsi de facto la politique fiscale, le système économique, la nature du régime démocratique, etc. Tout est fait pour que l’ennemi soit désigné : le Code du travail et l’impuissance des interlocuteurs sociaux !
Soyons clairs : ceux qui disent qu’il ne faut toucher à rien, comme ceux qui disent qu’il faut tout chambouler vivent hors sol et hors du réel. Ils sont à la fois dans l’idéologie (libérale) et n’ont bien souvent aucune idée (ils ne se posent parfois même pas la question) de ce qu’est la vie quand on gagne le Smic.
Il est vrai que, par exemple, quand on est chef économiste d’une grande banque et qu’on se prononce pour un Smic modulaire, on manque quelque peu d’humilité.
Au-delà du contenu même du Code du travail, ce qui est en jeu c’est le caractère républicain des relations sociales, à savoir assurer un minimum d’égalité de droit entre les salariés, ce qui passe par un code du travail, des accords nationaux puis des accords d’entreprise.
Inverser cette logique en privilégiant le niveau de l’entreprise, là où les salariés peuvent le plus subir de pressions, c’est aussi accroître les différences, les inégalités et les divergences. C’est le modèle anglo-saxon contre le modèle républicain.
Cette semaine sortira le rapport Combrexelle, dont on n’a pas encore le contenu. Le gouvernement a intérêt à faire attention à ce qu’il envisagera : il ne faudrait pas que, faute d’inverser la courbe du chômage, il inverse la hiérarchie des normes.