Sous couvert d’humanisme, le plan de stratégie nationale de lutte contre la pauvreté présenté par le chef de l’État dénigre la valeur à laquelle Force Ouvrière est tout particulièrement attachée : la solidarité. Ce principe essentiel, donnant pourtant corps à notre modèle social, encourage l’égalité réelle par la réduction des écarts de richesse et favorise l’entraide pour l’ascension sociale de tous.
Le projet du gouvernement dévoile alors un double objectif aux antipodes de cette conception : celui d’identifier dès le plus jeune âge les individus méritant une place parmi les premiers de cordée et, pour les plus démunis qui n’auront pas su saisir cette chance, de retrouver une dignité prétendument perdue en recevant un pécule minimal de l’État. Donné sous conditions, voire sous contraintes, dont celle de retrouver une activité ; tout manquement viendra sanctionner les bénéficiaires d’aides pour leur supposée absence de bonne volonté.
Soi-disant à l’origine de l’effritement de la cohésion sociale, notre modèle fondé sur le principe de solidarité est présenté en filigrane comme l’un des principaux responsables des maux de notre société où les bénéficiaires d’aides, poussés à choisir l’assistance plutôt que le retour vers n’importe quelle activité, encouragent la défiance sociale. Force Ouvrière répond à cette charge contre notre système que seule l’individualisation de la société, porteuse d’inégalités, est la vraie responsable du délitement de cette dernière.
Contrairement au nouveau monde né de la cuisse de Jupiter et se résumant à l’affirmation vouloir, c’est pouvoir
, le modèle actuel repose sur une conception progressiste où l’on refuse de parvenir seul, dans un esprit fraternel dont Force Ouvrière se réclame. La corde est la même pour tous et quand on a la chance d’être devant, tendre la main aux suivants par le partage et la redistribution, c’est finalement prospérer en permettant à chacun de passer de l’autre côté de la montagne. A contrario, quand on est seul avec sa corde, on sait bien comment cela se termine…
La Sécurité sociale, d’une modernité sans pareille par sa capacité à offrir la plus grande mutualisation des risques possible, incarne le plus bel exemple de construction de solidarité collective entre les bien portants et les malades, les actifs et les retraités, ou encore entre les familles et les ménages sans enfant grâce à l’application du juste principe « cotiser selon ses moyens, recevoir selon ses besoins ». Force Ouvrière récuse ainsi fermement la disparition progressive d’un salaire socialisé, garant des droits collectifs, au profit d’un système d’assistance publique ou de charité financé par l’impôt, dont les bénéficiaires sont à la merci de choix idéologiques des exécutifs en place.
Fruit d’une histoire syndicale et militante écrite parfois en lettres de sang, notre modèle est lui-même né de la solidarité nationale et internationale des travailleurs à la conquête d’un avenir meilleur. À l’image de la force du collectif et de la camaraderie qui ont permis la victoire de ces batailles, ce cadre social fondé dans l’ombre par quelques-uns au profit de tous, auquel Force Ouvrière a grandement contribué et pour lequel elle milite toujours, est pétri de solidarité en prenant en compte la diversité des besoins sociaux.
Sauver notre modèle fondé sur le principe de solidarité est ainsi l’une de nos plus belles batailles.
Et il faudra bien traverser la rue, non pas pour se chercher, seul, une activité sans avenir, mais ensemble dans l’unité la plus grande le 9 octobre prochain, pour revendiquer notamment l’importance de cette valeur, celle-là même qui fait le ciment de notre société et qui, par le collectif comme l’égalité de droits, permet de s’émanciper de ses chaînes.